Le temps retrouvé au royaume de la Mare au…
Dans cette Oasis Solognote, la « F.E.R.M.E » – Faire Ensemble dans le Respect Mutuel avec la PermaculturE – reçoit le public toute l’année, avec une valeur ajoutée, celle d’accueillir et de comprendre les acteurs tellement sollicités du monde des entreprises. Elle est présentée par ses hôtes comme « un lieu d’expérimentation, de partage, d’ouverture d’esprit et de convivialité autour des principes de la Permaculture ».
Ami, viens me rejoindre.
Les bois sont innocents.
Il est bon de voir poindre
L’aube des paysans. *
Une région privilégiée, entre Georges Sand, Victor Hugo et Maurice Genevoix.
Une vaste forêt gauloise parsemée d’étangs, région frontière qui séparait deux tribus celtes d’importance, les Carnutes et les Bituriges. Du Moyen Age à Napoléon Ier, les moines ont fait de cette province marécageuse un univers d’étangs et de cultures de terres pauvres, en particulier de seigle d’où la Sologne tire son nom. Bien loin de l’ambiance poétique et sauvage qu’elle revêt aujourd’hui en offrant un royaume préservé à la faune et la flore ; le climat rude marquait les hommes d’épidémies liées à l’insalubrité de ces terres humides faisant la part belle au terrible ergot du seigle qui fit des ravages sanglants. Les étangs ont été implantés principalement pour deux raisons : d’une part réorganiser la terre lessivée par les déboisements massifs, d’autre part permettre la pisciculture, plus lucrative que l’agriculture.
La Renaissance, pour courte qu’elle fut, offre une période d’or qui voit fleurir châteaux et belles demeures comme Chambord ou Cheverny ….O tempora, O mores ? La Révolution déserte les lieux, qui, retournant à l’abandon, favorise l’éclosion de la faune dont l’époque chasseresse de Napoléon III saura apprécier la richesse.
A deux heures de Paris, la Sologne, patrie de Maurice Genevoix et proche de George Sand, le petit village de Pierrefitte sur Sauldre nous accueille dans un paysage singulier proche de la campagne anglaise avec ses petites maisons de briques rouges ornées à l’envi de buissons de fleurs.
L’elfe dans les nymphées
Fait tourner ses fuseaux ;
Ici l’on a des fées
Comme ailleurs des oiseaux.*
Pierrefitte sur Sauldre, un éco-lieu au royaume de la mare au diable.
…Au bout d’un chemin de traverse, une porte d’entrée vers un univers magique d’elfes et de fées, où l’on rencontre deux magiciens de la Terre, Anne et Jean- Philippe Beau-Douëzy.
Si Anne a vu se dérouler son enfance au contact des animaux et de la Nature, la vie l’a conduite vers d’autres combats loin des arbres et des plantes. En effet, elle passe 30 ans dans la jungle urbaine comme fiscaliste puis avocate d’affaires au barreau de Paris. Elle parcourt le monde à la rencontre des dauphins ambassadeurs, qui suscitera un livre « La rencontre » pour finalement revenir au Bouchot comme médiatrice certes, mais aussi âme bienveillante des lieux.
Soucieuse de retrouvailles positives empreintes d’humanité, c’est naturellement qu’elle choisit le terrain de la médiation. Son expertise de médiateur conventionnel et judiciaire permet des solutions très concrètes, souvent en amont de situations de crise voire de burn-out naissant, engendrées soit en milieu d’entreprise ou en environnement familial.
Ecologue, naturaliste, Jean-Philippe s’engage depuis 35 ans de la Méditerranée à l’Amazonie – où il a séjourné plusieurs années- dans la conservation de la nature. Par son poste d’administrateur de la Fondation Yves Rocher /Institut de France enrichi d’une vie de globe-trotteur accompli, il a monté depuis 2007 avec Jacques Rocher, le programme « plantons pour la planète » en partenariat avec les Nations Unies pour l’environnement, ce qui représente à ce jour plus de 80 millions d’arbres plantés dans 25 pays sous son expertise. Il consacre son temps et son expertise à encourager et porter de nombreux projets autour de la Perma-culture en France et dans le monde entier, sans cesse en recherche de nouvelles pratiques.
Deux personnalités, deux compétences deux passions ! Voilà de quoi donner vie à un projet naturellement exceptionnel.
Je me suis fait un gîte
D’arbres, sourds à nos pas ;
Ce que le vent agite,
L’homme ne l’émeut pas*.
Une Oasis Solognote, la « F.E.R.M.E » – Faire Ensemble dans le Respect Mutuel avec la PermaculturE –
Une grande mare où, hérons cendrés, aigrettes blanches, canards colvert ou autres palmipèdes, répondent à des espaces herbeux ennoblis d’équidés divers, chevaux, poneys et ânes, dans un yin et un yang agricole et paisible.
Pourtant, peu à peu apparaissent comme l’esquisse de toits noyés sous une végétation luxuriante, précédés tel un gardien du paradis, par un zôme aux rondeurs bienveillantes, comme prémices des agapes futures. …
Oui, nous arrivons au Bouchot, ferme vivrière de plus de 300 ans à laquelle Anne et Jean-Philippe ont redonné vie depuis 17 ans.
Une nouvelle vie dans les champs transformés en jardin-forêts comestibles, une nouvelle vie dans les lieux transformés en espace de vie et d’accueil pour les citadins malades de la nouvelle peste que représentent l’épuisement professionnel ou personnel, le stress, la déconnection avec la famille ou avec les autres, ou pire, avec soi-même.
Le conte, aimé des chaumes.
Trouve au bord des chemins,
Parfois, un nid de gnomes
Qu’il prend dans ses deux mains*.
Un projet ou la vision symbolique se conjugue avec la multiplicité dimensionnelle.
Le projet du Bouchot ? Un projet d’envergure, d’où la nécessité de donner une identité aux différents espaces et jardins en forme de Mandala : Nelson pour ce premier jardin en référence phonétique, politique et néanmoins poétique à Nelson Mandela, l’un des mentors philosophiques de notre hôtesse. Un autre jardin en forme de Mandala sera baptisé Séligonia, en référence à la terre de seigle.
Les plantes grimpantes trouvent aussi leur place : au sol, les fleurs se mélangent aux plantes médicinales et aux légumes. Les sols ne sont pas retournés, mais reconstitués notamment par l’apport du fumier des animaux et d’humus obtenu par le compostage de déchets végétaux. Il occupe une surface de 2 500 m2 et regroupe de nombreux arbres fruitiers, essentiellement des vieilles variétés.
Déambuler au gré des chemins…… le regard s’apaise, le pas se ralentit face à la profusion des possibles Comment choisir ? Surtout ne pas choisir, et laisser faire la curiosité et l’envie. C’est pour le promeneur comme une subtile et immédiate réappropriation d’un nouveau rythme : le sien, dans son humanité apaisée. Aller à gauche vers une longue grange s’effaçant sur une entrée de jardin proche d’une porte insolite rappelant l’un des quatre éléments (eau-terre-air ou feu) ; nous voici dans le premier jardin agro-forestier du site. Dans les jardins-forêts, arbres et arbustes, comme l’amélanchier, les arbousiers, les cassis, les goumis, les groseilles, les framboisiers ou les mûres, constituent la base de l’élaboration du site agricole.
Tout comme l’hirondelle,
La stance quelquefois
Aime à mouiller son aile
Dans la mare des bois.*
Un Eco-lieu, né en 2010 et premier du genre
Architecturé à la façon d’un Mandala – terme sanskrit signifiant cercle – il propose ainsi une représentation symbolique de la planète Terre. La ferme, dédiée pendant plus de 150 ans à l’élevage bovin, se doit de revenir à la nature et de favoriser le retour de la biodiversité. Pour cela, planter des arbres et des haies sur les sols dégradés par une longue période d’agriculture conventionnelle tout en laissant les lieux aux bons soins de quelques animaux choisis s’est montré très efficace.
Ce repos salvateur des terrains a permis l’implantation d’un temps nouveau, le temps du jardin-forêt comestible.
Aller à droite vers le zôme, éco construction en bois de forme circulaire, composée de losanges en bois agencés en double spirale, d’une surface de 60 mètres carrés. Blotti au cœur du jardin mandala, Séligonia, cet espace harmonieux, dont les éléments de construction s’inspirent du nombre d’or que l’on retrouve à l’envi dans la nature ou dans les églises romanes, est inauguré le 15 Octobre 2016. Le parti-pris de ce nouveau jardin était de proposer un jardin comestible à plus de 95%. Ce trésor végétal comprend donc plus de 122 espèces d’arbres fruitiers – dont 20 espèces de poires et 20 espèces de pommes distinctes – avec la particularité que chaque arbre est une variété différente et porte un nom spécifique.
Un financement participatif pour un projet solidaire, humaniste, respectueux de la nature, de sa faune et de sa flore.
Monté grâce au système du financement participatif associé à un actif bénévolat, le zôme est présenté en écrin par le jardin qui l’entoure et abrite les multiples activités proposées aux résidents des lieux. Autour, chacun y est bienvenu et peut y planter la tente, se nourrir des fruits et légumes offerts à portée de mains et de narines en fonction des saisons, cueillis et préparés suivant l’humeur en solitaire ou avec les conseils avisés des hôtes.
Par les différentes énergies qu’il dégage, ce nouveau jardin se double d’un lieu d’hébergement, de ressourcement, simple et peu onéreux, agréable aux sens comme à l’esprit. Chaque espace est un tableau, comme un Arcimboldo en trois dimensions. Corne d’abondance, les résidents émerveillés peuvent se consacrer à la découverte, à la cueillette et à la dégustation de nouvelles recettes gouteuses dans un sybaritisme naturel et botanique.
Moi, ce serait ma joie
D’errer dans la fraîcheur
D’une églogue où l’on voie
Fuir le martin-pêcheur.*
Cheminant toujours selon son gré… Plus loin, les serres abritent les préparations de semences ; (loin des semences hybrides issues des grands semenciers mondiaux qui sont totalement stériles et soumises aux aléas du marché international), la semence naturelle reproductible est signe de vie et d’autonomie financière, et donc de liberté alimentaire. A ce titre, le Bouchot, par la biodiversité des plantes et fruits qu’il accueille et développe, est en totale autonomie semencière et permet maintenant la plantation de plus de mille pieds de tomates dans un arc-en-ciel de couleurs et de formes.
…. Finalement, pousser le petit portillon et s’avancer dans ce qui fut une cour de ferme en terre battue devenue en peu de temps une corne d’abondance végétale …. La cour ne comportant que des cailloux a été investie d’arbres qui se sont développés en dépit des contraintes, donnant à voir une taille et une forme quasi « bonzaï » comme le magnolia, le houx ou le fusain, prouvant s’il en était besoin, la force régénérative de la Nature.
Partout foisonnent lavandes, rosiers et plantes aromatiques, demeures parfumées des multiples coléoptères et autres OVNI (Objets Volants Naturels Indispensables), mais aussi grimpantes diverses comme chèvres-feuilles, vigne-vierge, passiflore, clématites font leur vie sur les murs avoisinants.
L’intérêt de l’époque moderne et de ces philosophes de la Nature comme Jean-Philippe et Anne est que ceux-ci ont compris, intégré que ce n’est pas à l’Homme de dompter la Nature, mais à l’homme de se laisser guider par elle.
C’est ainsi que tous les jardins de l’Eco-lieu du Bouchot sont organisés selon une certaine « autonomie ». Cette indépendance des jardins, bien loin des contraintes chimiques, redonne tout au contraire à la Nature sa place et à l’Homme sa liberté.
Tout est fait, dans ces lieux, pour recevoir et se retrouver. Plus ? des ateliers du moment sont proposés, autour de la Permaculture, de la dynamisation de l’eau, de la connaissance sur les semences, de la préparation de son futur propre jardin.
Ami, l’étang révèle
Et mêle, brin à brin,
Une flore nouvelle
Au vieil alexandrin*.
Mais aussi, et c’est une vraie valeur ajoutée, cela permet une reconnexion à son propre jardin intérieur. En effet, la particularité et l’expertise d’Anne offrent des opportunités de remise en question personnelle et surtout professionnelle ; comment oser changer de vie, comment s’y prendre concrètement, mais aussi, comment intégrer dans son univers professionnel de plus en plus mis à mal et contraignant, du sens, de la vie, du rythme et de la respiration.
La grande originalité du Bouchot est là. Non seulement, ce « retour » à une écoute de la Nature comme respiration du corps, mais un travail de l’esprit très concret en association avec les entreprises et les salariés, de tous milieux professionnels et de tous niveaux pour apprendre à travailler autrement.
Pour cela, tout est possible pour organiser réunions rencontres, échanges, dans l’étable réaménagée très agréablement ou même dehors, ouvrant ainsi le champ des possibles. C’est en sortant du cadre, sans se sentir en danger, mais tout au contraire dans un environnement bienveillant et chaleureux que l’on peut se changer soi-même
Entrons dans la cuisine lieu de recettes culinaires autant que de recettes de bavardages. Autrefois lieu d’échanges et pièce principale de vie, le système de la cuisine « bourgeoise » a isolé et réduit ce lieu aux activités culinaires. Aussi, c’est en remettant la cuisine au centre de la vie de la maison par la présence de diverses tables, de livres, d’objets et d’outils anciens, mémoires vives de notre humanité que s’encouragent des discussions sans fin que les hôtes provoquent en suscitant la confrontation de divers points de vue, parfois complémentaires, parfois plus animés.
Le style se retrempe
Lorsque nous le plongeons
Dans cette eau sombre où rampe
Un esprit sous les joncs.*
Et si notre nouvelle frontière si chère à Kennedy était la planète Terre ?
L’histoire de la Nature est aussi l’histoire des Hommes. Si le paléolithique, qui pour mémoire, il y a trois millions d’années, a vu le développement des groupes de chasseurs cueilleurs, premier système de subsistances de l’espèce humaine, la sédentarisation des communautés a vu cette même espèce se mettre à « organiser » et à se « servir » de la Nature en la « pliant » à sa volonté.
Le jardin dit « à la française » de Versailles, Villandry ou d’ailleurs, qui pourtant nous donne à voir des espaces magnifiés, représente une expression ultime de ce qui pourrait être, au fond, le comble d’une chirurgie esthétique agricole qui n’a donc rien de naturel.
Anne et Jean-Philippe n’ont de cesse que de réaffirmer cette conviction : ce n’est tant par les opérations médiatico-politiques que les choses bougeront, que par la multiplication des actions locales, anonymes, à l’initiative de personnes qui se retroussent les manches. Les scientifiques nous entrainent dans la peur et un processus d’inévitabilité mortifère qui ne donne plus d’espoir.
Pourtant cet espoir existe. Et s’il suffisait d’agir avec le cœur plutôt que de laisser notre humanité se laisser régenter par la technique ? La nouveauté d’un lieu d’expérimentation comme l’Eco-lieu du Bouchot donne à voir une organisation bienveillante et généreuse de la vie de l’Homme avec la nature.
Le message ? Revenir à la nature c’est découvrir de nouvelles odeurs, de nouvelles recettes, la gourmandise et le partage, base de toute tablée réussie. Par cette luxuriance, c’est aussi nous réapproprier notre vie et refonder notre humanité.
Viens, pour peu que tu veuilles
Voir croître dans ton vers
La sphaigne aux larges feuilles
Et les grands roseaux verts.*
Anne-Hélène Despois
Naturaliste-Conférencière.
Comment se rendre à la F.E.R.M.E du Bouchot
Depuis Paris : A10 puis A71, Sortie Lamotte Beuvron
Depuis Clermont-Ferrand : A71, Sortie Salbris
…A 20 minutes de la sortie de l’autoroute.
A l’échelle européenne
Amsterdam – 7h 15 Bruxelles – 5h
Calais – 5h Paris : 2h
Périgueux – 3h 30 Toulouse – 4h 30
Lyon – 4h Montpellier – 5h 16
Perpignan – 6h 15
Depuis Paris-Austerlitz, Gare SALBRIS si train direct
Si changement à Orléans ou Vierzon, Gare NOUAN LEFUSELIER
Un taxi ou un membre de la tribu peut venir vous prendre à la gare.
Références internet des lieux
https://www.lebouchot.com
https://www.youtube.com/watch?v=VYRULZcc8c0
https://www.youtube.com/watch?v=uhySWvkWGP4
A lire & A écouter.
*Victor Hugo : « Fuite en Sologne », extraits du poème dédié à Marante
**Laurent Gounelle « Le philosophe qui n’était pas sage »
*** George Sand « La mare au diable »
****Philippe Prévot « Histoire des Jardins », Ulmer
Pour comprendre la forêt nourricière en 12 minutes : https://www.youtube.com/watch?v=zn6v5cLhRTw