J + 18 !!!!
Bientôt 3 semaines que je suis confinée et bloquée en Tunisie.
Confinée comme tout le monde mais bloquée loin de chez moi car plus de vol, plus de bateau, plus de bus. J’ai bien pensé rentrer à la nage mais… je ne suis pas assez entraînée pour une telle traversée.
Drôles de sensations. Je me sens acteur passif d’un film de sciences fiction. Je me sens vivre dans une ville qui n’existe pas, sortie d’un décor digne des studios Hollywoodiens. C’est beau une ville endormie mais cela tient du surréalisme, même Dali n’aurait pas osé l’imaginer. Peut-être Marguerite Duras…
Plus de voiture, plus de vélo, plus de scooter, plus de bruit, plus d’âme qui vive…
Un monde inconnu qui semble ne pas me concerner tellement il est insolite, inattendu et inimaginable pour mon esprit, pour nos esprits.
Aurions-nous à faire à une guerre bactériologique, comme on en voit dans les films catastrophes souvent diffusés sur TMC, M6 ou autres chaînes grand public. Ce que nous montre ces films ? Nous sommes en train de le vivre et pas sur un home cinéma !!!! In live comme on dit.
Ici en Tunisie, les voitures de l’armée ainsi que celles de la police sillonnent les rues, se postent aux carrefours et vous surveillent sous la protection de leurs armes bien en évidence, au cas où l’on se croirait dans « il était une fois dans l’ouest » !!!!
Une double sensation plutôt bizarre que de se sentir à la fois prisonnière de cette situation et très peu concernée par elle.
Seule dans une maison avec une latitude très relative. Une amplitude de déplacements contrôlée mais tout de même je voyage : voyage en cuisine pour mitonner un poulet au citron que personne ne viendra partager, soutenue par l’odeur alléchante je suis les conseils de mon GPS perso, très perso. Donc je tourne à droite direction le salon pour ingurgiter un thé devant une série télé sur NETFLIX qui fait oublier les infos anxiogènes, finalement le GPS me propose de faire quelques mètres vers la gauche jusqu’à un fauteuil pour prendre un bouquin et m’évader autrement, allez, au bout d’un moment je change de destination, là je prends carrément la boussole et je traverse deux pièces (aventureux tout de même surtout que lorsqu’on est seul, dur dur de s’encorder !) et je me retrouve devant mon ordi, j’envoie des mails aux amis, j’appelle les copines, je WhatsApp sur les petits groupes : Coro, confiture, M3Ateam, Gap you, Amigos … bon au bout d’un moment y en a assez alors encore un petit thé et un moment de musique, là j’ai migré vers le canapé, j’ai sauté deux tapis, pas volants. Je ne sais pas pourquoi mais en ce moment j’écoute en boucle La Cello Suite N°1 de Bach, va savoir ce qu’elle m’évoque ??? Je vais en causer à l’olivier devant la porte d’entrée.
J’oubliais, je fais aussi germer des graines, ça occupe car il faut changer l’eau tous les jours pendant 3 jours puis les regarder germer pendant encore trois jours, voilà des rendez-vous quotidien devenus très importants.
Je repense à cette phrase d’enfant lors de voyages familiaux en voiture : «maman, c’est quand qu’on arrive ? » « Maman, c’est quand qu’on s’arrête ? »
Mais oui, on va en sortir de ce confinement, ça c’est sûr !
Nous allons sortir de là un peu comme après un énorme accident de voiture qui nous aurait mis KO et plonger dans un coma provoqué, un coma de confort, confort relatif. Le moment de sortie de cette situation sera un peu comme la sortie d’un coma traumatique.
Nous allons avoir besoin de séances de rééducation comportementales, rééducation pour changer notre regard sur notre monde, rééducation pour apprendre à vivre autrement, rééducation pour oublier nos vieux réflexes de consommateurs boulimiques et surtout nous allons avoir besoin d’une rééducation pour comprendre que nous sommes les locataires de la nature !!!!!!!!!
Je doute que toutes ces rééducations soient des réussites car j’ai toujours cette petite phrase d’un certain Grand Homme d’Etat : « Français vous avez la mémoire courte !!!! »