GRAND PRIX DU LIVRE AFJET 2022
LA PRÉSÉLECTION
Une édition 2022 ambitieuse
L’édition 2022 du Grand Prix du livre AFJET engage manifestement l’association sur une nouvelle route, en direction des sommets. Cette destination ambitieuse, visée par le Conseil d’Administration et par le comité de sélection du Grand Prix du Livre, se traduit ici par une présélection prestigieuse. Le lauréat 2022 sera certainement un des meilleurs ambassadeurs de la dynamique de l’AFJET autour du tourisme qui ose…, d’un tourisme fédérateur, riche en découvertes insolites de nos territoires.
Hier, Pierre ADRIAN et Philibert HUMM (Equateurs littérature 2018), René FRÉGNI (Gallimard 2020), Catherine FAYE (Fayard 2021) comme aujourd’hui et demain, les auteurs deviendront à leur tour, acteurs de cette promotion.
Découvrons-les :
«Un barrage contre l’Atlantique»
Frédéric Beigbede
«Ce livre a été écrit dans un endroit qui devrait être sous l’eau». F. B.
Au hasard d’une galerie de Saint-Jean-de-Luz, Frédéric Beigbeder aperçoit un tableau représentant une cabane, dans une vitrine.Au premier plan, un fauteuil couvert d’un coussin à rayures, devant un bureau d’écrivain avec encrier et carnets, sur une plage curieusement exotique. Cette toile le fait rêver, il l’achète et soudain, il se souvient : la scène représente la pointe du bassin d’Arcachon, le cap Ferret, où vit son ami Benoît Bartherotte. Sans doute fatigué, Frédéric prend cette peinture pour une invitation au voyage. Il va écrire dans cette cabane, sur ce bureau. Face à l’Atlantique qui à chaque instant gagne du terrain, il voit remonter le temps. Par vagues, les phrases envahissent d’abord l’espace mental et la page, réflexions sur l’écriture, la solitude, la quête inlassable d’un élan artistique aussi fugace que le désir, un shoot, un paysage maritime. Puis des éclats du passé reviennent, s’imposent, tels «un mur pour se protéger du présent».
«Un barrage contre l’Atlantique» Frédéric Beigbeder. 2022 Grasset 272 pages / 20 €
«Paris Briançon»
Philippe Besson
Le temps d’une nuit à bord d’un train-couchettes, une dizaine de passagers, qui n’auraient jamais dû se rencontrer, font connaissance, sans se douter que certains n’arriveront jamais à destination. Un roman aussi captivant qu’émouvant, qui dit l’importance de l’instant et la fragilité de nos vies. Rien ne relie les passagers montés à bord du train de nuit n° 5789. À la faveur d’un huis-clos imposé, tandis qu’ils sillonnent des territoires endormis, ils sont une dizaine à nouer des liens, laissant l’intimité et la confiance naître, les mots s’échanger, et les secrets aussi. Derrière les apparences se révèlent des êtres vulnérables, victimes de maux ordinaires ou de la violence de l’époque, des voyageurs tentant d’échapper à leur solitude, leur routine ou leurs mensonges. Ils l’ignorent encore, mais à l’aube, certains auront trouvé la mort.
«Paris Briançon» Philippe Besson. Julliard 308 pages 2022 /19 €
«Marche en plein ciel»
Gwenaëlle Abolivier
En arpentant le chemin emprunté par Robert L. Stevenson il y a plus d’un siècle, Gwenaëlle Abolivier harmonise deux passions : l’écriture et la marche. Chaque pas qui l’éloigne de l’immobilité du quotidien, l’ouvre davantage à la littérature ; elle fait corps avec le paysage cévenol qui accueille son évasion. Sous le ballet aérien des milans royaux, elle partage l’errance du voyageur Marvejols et de Luce, son ânesse, – rencontrés au détour des sentiers – le temps d’une parenthèse consacrée à l’écoute du vivant.
Au fil de ce voyage où elle tutoie le ciel, la solitude lui ouvre l’espace nécessaire pour réfléchir à la course du monde à travers le pays découvre bien plus qu’un journal de marche, Gwenaëlle Abolivier nous offre une méditation en mouvement où le rythme et l’effort de ses pas impulsent une écriture poétique qui délivre le récit.
«Marche en plein ciel» Gwenaëlle Abolivier. 2022 Le Mot et Le Reste 122 pages / 13 €
«Les flammes de pierre»
Jean-Christophe Ruffin
«Rémy et Laure partageaient le sommet de Croisse-Baulet et, si modeste qu’il fût, il faisait pour eux de cet instant un moment inoubliable. Rémy connaissait trop la force de cette communion pour y mêler les gestes minuscules de l’amour. Il sentait que son désir était partagé, que cette émotion avait la valeur d’une étreinte et que Laure, pas plus que lui, ne pourrait l’oublier. Tout devait garder son ampleur, sa grâce. Les petites effusions, les maladroites caresses humaines, dans ces décors de lumière, d’espace et de vent, sont dérisoires et même insupportables. Il fallait laisser l’esprit se mouvoir sans contraintes. Le regard était suffisant pour exprimer l’émoi et celui de Laure parlait sans ambiguïté. Ils retirèrent les peaux de phoque des skis, réglèrent les fixations pour la descente et raccourcirent les bâtons. Puis, sans se hâter, l’esprit plein d’un moment qu’il était inutile de faire durer tant il était saturé d’infini, ils s’élancèrent dans la pente.»
Avec ce chant d’amour à la vraie montagne, celle de la périlleuse et âpre beauté des cimes, Jean-Christophe Rufin réussit son pari de renouer avec la littérature de montagne la plus pure, comme dans une version moderne de Frison-Roche. Et c’est avec le plus grand plaisir que l’on goûte avec lui cette ivresse des sommets, qu’il connaît si bien pour l’avoir expérimentée.
«Les flammes de pierre» Jean-Christophe Rufin. Gallimard 352 pages / 21 €
«Les bourgeois de Calais»
Michel Bernard
Quand Omer Dewavrin entre dans l’atelier d’Auguste Rodin, dédale de formes humaines de pierre et de glaise, il a la certitude d’avoir fait le bon choix. Notaire et maire de Calais, il a confié au sculpteur à la réputation naissante la réalisation d’un monument en hommage à six figures légendaires… de la guerre de Cent Ans : les Bourgeois de Calais. Nous sommes en 1884, et Dewavrin ne sait pas encore qu’il s’écoulera dix ans avant que l’artiste, en quête de perfection, se décide à déclarer son travail achevé. La bouleversante chorégraphie de bronze n’existerait pas sans ce bourgeois du XIXème s. qui, devinant le génie du sculpteur, l’obligea à aller au bout de lui-même et imposa son oeuvre en dépit du goût académique et des controverses idéologiques. Sa femme Léontine et lui sont les héros inattendus de cette histoire, roman de la naissance d’une amitié et de la création du chef-d’œuvre qui révolutionna la sculpture.
«Les bourgeois de Calais» Michel Bernard. 2022 La Table Ronde 208 pages / 20 €